Romane est une jeune artiste qui était présente lors de l’évènement Le moulin de Boisseron, pour la « rénovation » d’un vieux moulin durant lequel il était établi que faire art cela commençait par être ensemble.
Pour elle, ce n’était pas un évènement de collectif, mais une invitation à laquelle elle a répondu et ce moment regroupait des personnes qui ne se connaissaient pas. Le projet n’était pas défini, il n’avait pas de cadre. Tout était sur une vague et pas sur une histoire de collectif.

Personne n’était issu des mêmes situations. Il y avait des étudiantes, des chercheurs, des habitants du village, des artistes, des jeunes, des vieux. Les gens ne partageaient pas la même expérience de ce genre moment.

Elle précise qu’il y’a cadre et cadre. Dans son expérience de la section Design & Espace de l’ESAAA (école supérieure d’Art Annecy Alpes), ces moments de partage et de collectif faisaient justement partie de la pédagogie. Aucun cadre n’était imposé par la section, il s’agissait simplement de vivre des moments ensemble. Au moulin de Boisseron, les pique-niques constituaient les seuls moments de collectif. Dans la mesure où l’on découvrait le lieu et les gens en même temps qu’on y était, on n’était pas préparés à cette situation.

Les moments qui ont créé du collectif c’est les gitans. C’était un instant où tout le monde était équitable, personne ne les connaissait et ils ne connaissaient pas le groupe non plus. Cela semblait mettre en place une sorte d’égalité de situation. C’est les moments de découverte ou de rencontre collective qui forment un groupe. Si tout le monde découvre en même temps, il est question d’une base où chacun·e se retrouve dans la même situation.
Ces moments se préparent. L’organisateur avait une position étrange, car il ne s’est pas laissé d’inconnu, ce qui fait que le groupe n'a pas découvert les choses ensemble.

Elle donne l’exemple de l’association qu’elle est en train de monter avec J. et R. Leur but est de fabriquer des moments de collectifs autour de situation qui intrigue un·e des membres du collectif. Romane a entendu parlé d’un viticulteur qui utilise de la musique pour faire pousse ses vignes. Il fait des concerts de punk dans son garage pour magnifier son vin. Romane aimerait encadrée cette rencontre et la proposer aux autres membres de l’association.

C’est ça de faire une découverte partagée. Personne ne sait trop ou iel en est et être ensemble cela aide. Mais elle précise qu’il faut le faire avec des individus qui sont familiers. Car si vous le faites avec des personnes que vous ne connaissez pas, vous allez devoir vous mettre à l’écart, ou alors vous fabriquerez des moments pour vous découvrir. Il faut être capable de savoir comment les gens vont réagir. La position d’effacement de l’organisateur du moment au moulin était bien, mais l’expérience était trop courte. Romane a pris trois jours pour parler à tout le monde quand même. La première semaine, il aurait fallu la dédier à la rencontre. Une autre solution aurait été d’habiter toustes ensemble, cuisiner ensemble, faire la vaisselle ensemble. Il faut vivre et fabriquer en même temps. Les espaces informels c’est ce qui offre le piment des groupes.

Il ne s’agit pas tant d’une immersion dans les lieux. Vivre ensemble ça veut dire se donner du temps mutuellement. Ce sont des moments en dehors du travail. Les instants personnels sont importants, porter de l’attention aux autres en apportant une bouteille de vin ou un cadeau, en prenant des nouvelles par exemple.
Pour lier le travail et la vie, ce n’est pas difficile, car la production se base sur autre chose que la vie collective. Les deux s’équilibrent tout seuls. La vie collective se compose petit moment par petit moment (un groupe de 15 ne communique pas de la même manière qu’un autre de 5.) La structure du groupe se fabrique toute seule grâce à chacun de ces membres. Chacune a sa propre image du groupe. Car si une image commune existe, cela sous-entend la présence d’un chef. Si les groupes sont constitués de gens qui ne se connaissent pas, il faut un chef, ou bien un cadre pour qu’il n’y ait plus besoin de chef.

Si les membres d’un groupe sont des ingrédients, dans le cas du moulin, les ingrédients n’ont pas assez macéré ensemble, la pâte n’a pas prise.

Romane tient a préciser qu’un autre moment de collectif ça a été la découverte du tunnel. Personne ne savait ce qu’il y avait dedans.