Redistribuer les rapports de forces
Nous avons fait émerger certaines contradictions au sein du groupe d’habitant·es. Nous admettons que chacun·e souhaite modifier la structure du groupe. Tentons à présent de voir ce qui se cache derrière les querelles. Qu’est ce que le désaccord peut produire de créatif ? Dans cette étape nous allons proposer aux habitant·es ayant des points de vue contraires de discuter autour de ce qui les oppose. Ce sera des petits groupes de discussion de deux habitant·es. Leur but sera de tendre vers un consensus qui peut régler leurs deux problèmes. Ensuite, chaque groupe pourra en faire la proposition à l’ensemble des habitant·es. Dans cette étape, l’enjeu est de confronter les opposés afin de briser les dichotomies existantes. Un nouveau mode d’existence a réussi à sortir de ces discussions.
Les discussions en binôme
Les propositions au reste du groupe
Dans les nouveaux modes opératoires, les responsabilités, les places de pouvoirs, les microgroupes sont mobiles, donc la structure sociale du village est amenée à se modifier toutes les semaines. Toutes les semaines, une nouvelle économie et écologie voit le jour. Ainsi, la structure sociale initiale du village est mise à mal. Dans un village où la majorité des pouvoirs se redéfinissent chaque semaine, est-il encore possible de parler de schémas de dominations ? Bien sûr, mais ces rapports sont redistribués de manière hebdomadaire, donc leur établissement pérenne est impossible. L’aspect modulable de la structure permet aussi de rassembler des gens qui ne viennent pas des mêmes milieux, qui ont des intérêts différents et dont les points de vue parfois opposés.
Après toutes ces discussions, il est utile d'archiver sur un panneau d'affichage de manière claire la première constitution du village :
I) LES COORDINATEURICES
Les rôles de coordinateurices sont des rôles organisationnels et structurels. Il y en a sept. Chacun de ces rôles est occupé par un·e habitant·e différente par semaine (sauf cas spécifiques). Celleux qui assument ces rôles ont été tiré au sort. Si une personne tirée au sort ne se sent pas apte à assumer cette fonction pour le moment est en droit de refuser. Ces sept rôles sont les suivants :

–coordinateurice des travaux : iel (en concertation avec le reste du village) décide des travaux qu’il faut réaliser pour la semaine suivante et qui les attribue aux habitant·es. L’attribution se fait par tirage au sort. C’est également la personne qui prend note de l’autoattribution des habitant·es de leurs travaux personnels. Ces derniers sont pris en compte dans l’attribution générale des travaux.

–coordinateurice des clubs : iel prend note de la mise en place de chaque club. Iel reçoit les candidatures spontanées et les prend en notes. Ainsi, iel vérifie que les principes des clubs sont bien respectés (changements réguliers, etc.).

–coordinateurice des assemblées générales : c’est la personne que les habitant·es contactent s’iels veulent faire une assemblée générale. C’est elle qui les organise et les archive. Son rôle est également de faire la médiation, facilitation durant ces moments.

–coordinateurice de la monnaie locale : iel s’occupe de stocker la récolte de clémentine, iel les trie, les compte. Iel distribue également le revenu universel à chaque habitant·es (y compris à ellui-même) en fonction du nombre d’unités de clémentines de la récolte de la semaine passée.

–coordinateurice du marché : iel est chargé·e d’organiser le marché hebdomadaire. Iel doit se tenir informé·e auprès de lia coordinateurice de la monnaie pour connaître le montant de monnaie disponible de la semaine pour fixer les prix des biens. Car la seule règle d’attribution des prix des produits disponibles sur le marché est la suivante : il ne faut pas que la somme du prix des produits disponibles dépasse la quantité de monnaie en circulation de la semaine.

–coordinateurice des conseils de conflits de village : c’est la personne qui organise les conseils de conflits. Il s’agit du moment où les litiges, les conflits se règlent. N’importe qui peut demander de convoquer un conseil. C’est lia coordinateurice des conseils qui se charge de recevoir les plaintes. Dans la première étape, elle convoque les personnes concernées. Dans un second temps elle organise un conseil public pour solliciter l’avis du reste du village. Si besoin est (uniquement), lia coordinateurice des conseils est en droit de trancher.

–coordinateurice de la communication : iel rend tout public, iel s’occupe de la communication des évènements, des conseils de conflits, des assemblées générales, etc. Toustes les autres coordinateurices doivent lui communiquer leurs informations. Ainsi, en fin de semaine, c’est lia coordinateurice de la communication qui publie la liste de répartitions dans les clubs, les travaux et qui rend visible les comptes de la monnaie disponible. C’est également cette personne qui tire au sort les prochain·es coordinateurices.

II) LE TRAVAIL
Le travail n’est pas rémunéré. Il se répartit en deux façons : les travaux d’utilité publique et les travaux d’utilité personnelle.
Les travaux d’utilité publique sont les tâches à accomplir pour le bon fonctionnement du village, cela comprend :
– tous les rôles de coordination (travaux, clubs, monnaie locale, marché, conseils des conflits, assemblées générales, communication)
– le travail agricole pour la récolte de la monnaie et pour la nourriture des habitant·es
– le travail de maintenance, réparation, entretien
La liste n’est pas exhaustive et peut être complétée en fonction des besoins du village.
Les travaux d’utilité personnelle ne se doivent pas d’être directement utiles pour le village, il s’agit d’une forme de reconnaissance des envies/passions/capacités de chacun·es.
Le contrat de travail est le suivant : 30 heures de travail à répartir librement dans la semaine (15 heures de travail d’utilité publique et 15 heures de travail d’utilité personnelle). Tout ce qui est produit dans le cadre du contrat de travail est considéré comme un bien commun et atterrit dans la caisse commune (non loin du fond commun de monnaie).
Les postes ne sont pas fixes, chaque fin de semaine les postes se redistribuent par tirage au sort.

III) LES LOISIRS
Le village propose un système de clubs afin de partager, échanger sur des passions, des savoir-faires spécifiques. Il n’y a pas de sélections pour rentrer dans un club, il s’agit de candidatures spontanées. Le but des clubs c’est l’expression personnelle. Ainsi, les clubs sont forcément d’utilité publique, car ils servent au bien-être de leurs membres. Les clubs sont aussi des espaces pour partager des passions. Les premiers clubs sont fondés à l’initiative des habitant·es désirant partager un savoir-faire, une passion, une activité fétiche. Par la suite, chacun·e pourra proposer autant de clubs qu’iel le souhaitera.
Cliquez sur les panneaux beiges
Si ces activités personnelles portent le nom de clubs, c’est qu’ils ont pour vocation d’être ouverts, partagés et libres. Ainsi, la participation à un club n’est pas obligatoire. Il n’est possible de rester dans un même club que pendant une semaine. Seul un membre reste fixe durant deux semaines pour en garantir la continuité. Ce membre est choisi par les membres du club en question et ne peut pas être lia fondateurice. Les productions éventuelles, réalisées dans les clubs sont personnelles, les membres peuvent les garder pour elleux.
En plus du système des clubs, le village ne condamne aucune pratique récréative et de loisir.

IV) L’ÉCONOMIE
La monnaie locale périssable est la clémentine, un fruit équivaut à une unité de monnaie. Cette monnaie est récoltée dans le verger commun au centre du village et se stocke dans le fond commun de monnaie.
Le fond commun verse à chaque habitant·e un revenu universel chaque fin de semaine.
Le court de la monnaie locale est instable. En effet, la quantité d’unité de monnaie varie d’une semaine sur l’autre, les récoltes pouvant être altérées par le temps, les saisons, etc. Alors le montant du revenu universel, est la répartition de cette somme en neuf parts égales. Ainsi, le montant du revenu n’est pas identique toutes les semaines.
Il est possible de calculer la valeur restante d’une clémentine en train de pourrir en fonction du pourcentage de peau encore orange. Il est possible de manger son revenu universel. Il est possible de l’utiliser dans les transactions en la séparant en quartiers. Mais un quartier vaut moins qu’une clémentine entière.
Le nombre d’unités de monnaie disponible pour une semaine définit les prix des produits et biens sur le marché.
Une fois par semaine, lors d’un marché, les habitant·es peuvent acheter des biens, mais pas en vendre. La monnaie utilisée lors des transactions retourne dans le fond commun pour être ré-injectée dans les revenus la semaine suivante.

V) LES PROPRIÉTÉS
Les habitant·es ne sont pas dans l’obligation de se délester des leurs possessions antérieures à leur vie dans le village.
Les biens produits dans le cadre du contrat de travail vont dans la caisse commune. Ils y ont un faible prix défini dont la somme ne doit jamais dépasser la quantité de monnaie disponible de la semaine. Les prix des biens communs sont donc fluctuants. Il est possible pour les habitant·es d’acheter ces biens, iels en disposent alors librement le temps qu’iels veulent, mais il ne s’agit pas de leur propriété. Une fois l’usage terminé, le bien retourne dans la caisse commune.


Le village s’est construit sur un cercle. La répartition des propriétés terriennes se déroule de la manière suivante :
Le centre du cercle est un espace commun séparé en quatre parties, un espace pour les réunions, un espace pour les bureaux de coordination, un espace pour les évènements festifs ou les rassemblements (espace totalement libre que les un·es et autres peuvent utiliser à leur convenance), un espace pour faire pousser la monnaie. Tout autour, il y a un espace neutre, non défini, entre le public et le privé. Pour leurs habitations/jardins les habitant·es disposent de tout le reste de la surface du cercle et s’installent où iels le souhaitent. Iels se voient octroyer un nombre de mètres carrés identique dans lesquels iels réalisent leur aménagement. Iels sont en droit de les aménager, décorer, installer, utiliser comme bon leur semble. Si des litiges éclatent, ces questions se règlent au conseil des conflits.

VI) LES RÉUNIONS/RASSEMBLEMENTS
Le village accueille plusieurs types de manifestations collectives :

–les conseils de conflits de village : il s’agit du moment où les conflits, les litiges et les désaccords se règlent. N’importe qui, qui en ressent le besoin, est en droit de convoquer un conseil de conflits auprès de saon coordinateurice. On y pratique une justice restaurative, non punitive et une communication non violente.

–les assemblées générales : c’est le moment où il est possible de discuter de tout. Le but d’une assemblée générale c’est de discuter du fonctionnement du village de manière générale. Une Assemblée générale sert à modifier des points structurels du village. Elle sert également à savoir comment les habitant·es vont, à mettre en évidences des systèmes qui ne fonctionnent pas ou ne conviennent plus, etc. Il est également possible pour n’importe qui de convoquer une assemblée générale en sollicitant lia coordinateurice concerné·e. Il ne peut y avoir qu’une seule AG par semaine. Une AG ne traite que d’un point à la fois. La thématique d’une AG est communiquée une semaine à l’avance. Il n’est pas nécessaire d’organiser une AG si personne n’en fait la demande.

Dans tous les moments de discussions officiels, quel qu’il soit, la stratégie de prise de décision adoptée par le village c’est le consensus.

Ensuite de manière moins formelle, il y a les clubs et tout ce que les habitant·es auront envie d’inventer s’iels sentent le besoin de se retrouver.


Zones de la forme
Quartiers des corps